Droit du Numérique

Incertitude sur l'obligation d'identifier les créateurs de contenu

21 Janvier 2009, 11:25am

Publié par Nicolas Herzog


De récentes décisions de justice ont fait naître un nouveau débat relatif à l’obligation des hébergeurs d’identifier les internautes créateurs de contenu.

 

L’article 6.II de la loi pour la confiance dans l’économie numérique dispose en effet que les hébergeurs « détiennent et conservent les données de nature à permettre l’identification de quiconque a contribué à la création du contenu ou de l’un des contenus des services dont elles sont prestataires. »

 

Mais, le dernier alinéa de cet article renvoi la détermination de la nature, de la durée et des modalités de conservation des données d’identification à un décret en Conseil d’Etat, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés.

 

Or, à ce jour ce décret n’a pas été publié.

 

On peut donc légitimement se poser les questions suivantes :


  • Malgré l’absence de publication du décret, les hébergeurs ont-ils l’obligation de recueillir et conserver les données permettant d’identifier les créateurs de contenu ?

  • Si oui, quelles sont les données qui doivent être recueillies, selon quelles modalités et pour quelle durée ?

 


Dans un jugement du 14 novembre 2008
(LAFESSE / YOUTUBE)
, le tribunal de grande instance de Paris a pour sa part considéré que Youtube même en l’absence de parution du décret d’application, avait l’obligation de collecter « les données de nature à permettre l’identification des internautes éditeurs sur son site […], à savoir, leurs nom, prénoms, domicile et numéro de téléphone ».

 

En s’abstenant de recueillir ces éléments, le tribunal a jugé que Youtube a failli à ses obligations d’hébergeur.

 

En revanche, dans une ordonnance du 7 janvier 2009 (MEZRAHI / YOUTUBE), la cour d’appel de Paris a considéré qu’en l’absence de décret d’application de la LCEN la communication des éléments d’identification personnelle que l’hébergeur est susceptible de recueillir à l’occasion des mises en ligne de contenu ne pouvait être ordonnée.

 

La cour d’appel a en outre précisé que le projet de décret ne faisait pas obligation à l’hébergeur de collecter les noms, prénoms, adresses et numéros de téléphone de l’éditeur de contenu.

 

Les hébergeurs sont donc à nouveau confrontés à une incertitude juridique qui ne sera définitivement levée que lors de la publication du décret, dont la date n’est à ce jour pas connue…

 

Rappelons néanmoins que l’article 1 du code civil dispose que :

 

« Les lois et, lorsqu'ils sont publiés au Journal officiel de la République française, les actes administratifs entrent en vigueur à la date qu'ils fixent ou, à défaut, le lendemain de leur publication.

 

Toutefois, l'entrée en vigueur de celles de leurs dispositions dont l'exécution nécessite des mesures d'application est reportée à la date d'entrée en vigueur de ces mesures. »

 

L’application de cet article conforte la position adoptée par la cour d’appel dans son ordonnance du 7 janvier 2009.


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