Droit du Numérique

Chèque falsifié : La copie numérisée fiable a la même force probante que l’original

11 Mai 2020, 10:00am

Publié par Nicolas Herzog

Par un arrêt du 12 décembre 2019 (RG n°18/05693), la Cour d’appel de Versailles a jugé que le Crédit Agricole et la Société Générale n’ont pas engagé leur responsabilité en payant un chèque litigieux qui ne comportait ni surcharge ni grattage et dont la mention du bénéficiaire correspondait à celle de l'endosseur.

 

La Cour d’appel a rappelé que la responsabilité des banques ne peut être recherchée si la falsification ne peut être détectée que par un contrôle averti et un examen approfondi du chèque excédant le contrôle rapide de la régularité formelle du chèque exigé d'un banquier normalement vigilant.

 

En l’espèce, le chèque litigieux comportait toutes les mentions obligatoires de l’article L.131-2 du Code monétaire et ne présentait pas d'irrégularités apparentes décelables par un employé de banque normalement diligent.

 

La Cour d’appel a également jugé que les banques n’avaient pas engagé leur responsabilité en ne produisant pas aux débats l’original du chèque litigieux.

 

Pour ce faire, la Cour d’appel a constaté que la banque remettante n’avait l’obligation de conserver l'original du chèque pendant le délai de rejet maximum de 60 jours à compter de la date d'échange et une copie recto-verso du chèque pendant 10 ans.

 

En l’espèce, la banque n’avait plus l’obligation de conserver l’original du chèque puisqu’un délai supérieur à 60 jours s’était écoulé.

 

La Cour d’appel a ainsi rendu sa décision sur la base de la copie numérisée du chèque considérant qu’elle constituait une reproduction fidèle et sincère de l'original.

 

L’article 1379 du Code civil dispose que :

 

La copie fiable a la même force probante que l'original. La fiabilité est laissée à l'appréciation du juge. Néanmoins est réputée fiable la copie exécutoire ou authentique d'un écrit authentique.

 

Est présumée fiable jusqu'à preuve du contraire toute copie résultant d'une reproduction à l'identique de la forme et du contenu de l'acte, et dont l'intégrité est garantie dans le temps par un procédé conforme à des conditions fixées par décret en Conseil d'État.

 

Si l'original subsiste, sa présentation peut toujours être exigée.

 

En l’espèce, la société qui avait mis en cause la responsabilité des banques n’avait pas remis en cause la fiabilité de la copie numérisée du chèque litigieux.

 

Si cet argument avait été soulevé, la Cour aurait dû se pencher sur le procédé utilisé par la banque pour effectuer la copie du chèque.

 

Le décret n° 2016-1673 du 5 décembre 2016 fixe les conditions permettant à une copie numérisée d’être présumée fiable.

 

Si le procédé de copie utilisé par la banque respectait les conditions du décret du 5 décembre 2016, alors cette dernière aurait bénéficié du renversement de la charge de la preuve de l’article 1379 alinéa 2 du Code civil.

 

Tel n’aurait pas été le cas en l’absence de respect des conditions du décret du 5 décembre 2016 et la banque aurait dû supporter le risque de la preuve de la fiabilité de la copie numérisée.