Copie privée: La source doit-elle être licite?
Copie privée : La source doit elle être licite ?
La copie d’une contrefaçon est-elle une contrefaçon ou relève-t-elle du régime de l’exception pour copie privée définie
à l’article L.122-5 2° du Code de la propriété intellectuelle ?
La réponse semble évidente.
Il semblerait en effet particulièrement incohérent de concevoir qu’un acte licite, la réalisation d’une copie privée au
sens de l’article L.122-5 du Code de propriété intellectuelle, puisse trouver son origine dans une contrefaçon.
Comment pourrait-on sérieusement imaginer que la reproduction d’une contrefaçon puisse être juridiquement appréhendée
autrement que comme une contrefaçon ?
Et pourtant, la question n’est à ce jour pas tranchée en France.
Dans un jugement du 13 octobre 2004, le Tribunal correctionnel de Rodez avait relaxé un particulier, âgé de 22 ans, poursuivi
pour avoir détenu 488 films téléchargés sur Internet ou copiés à partir de DVD empruntés à des amis en se fondant sur l’article L.122-5-2° du Code de propriété intellectuelle, et ce sans se
préoccuper du caractère contrefaisant de l’œuvre à partir de laquelle la copie avait été réalisée.
La Cour d’Appel avait confirmé ce jugement en se fondant sur les articles L.122-3 à L.122-5 du Code de la Propriété
Intellectuelle et en rappelant que « …lorsqu’une œuvre a été divulguée, l’auteur ne peut interdire les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privée du copiste et non
destinées à une utilisation collective. »
La Cour d’Appel s’est bornée à indiquer que la preuve d’une utilisation collective n’était pas rapportée, en s’abstenant de
répondre à la question de la licéité de la source de la copie privée.
La Cour de Cassation, saisie par le procureur et les parties civiles, dans un arrêt du 30 mai 2006, a cassé l’arrêt de la Cour
d’Appel sans trancher la question.
En effet, la Cour de cassation s’ est fondée sur l’article 593 du Code de Procédure Pénale en considérant « qu’en se
déterminant ainsi, sans s'expliquer sur les circonstances dans lesquelles les oeuvres avaient été mises à disposition du prévenu et sans répondre aux conclusions des parties civiles qui faisaient
valoir que l'exception de copie privée prévue par l'article L. 122-5, 2°, du code de la propriété intellectuelle, en ce qu'elle constitue une dérogation au monopole de l'auteur sur son oeuvre,
suppose, pour pouvoir être retenue, que sa source soit licite et nécessairement exempte de toute atteinte aux prérogatives des titulaires de droits sur l'oeuvre concernée, la cour d'appel n'a pas
justifié sa décision. »
Néanmoins, en se référant à la jurisprudence récente de la Cour de Cassation, et plus particulièrement à son arrêt du 24
septembre 2003, qui a rappelé que les marchandises contrefaites étaient hors du commerce, en faisant application de l’adage latin fraus omnia
corrumpit, on peut légitimement penser que l’arrêt de la Cour d’Appel de renvoi encourrait la cassation s’il qualifiait la copie d’une contrefaçon de copie
privée.
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